Le marché du carbone européen (SEQE) ne s’applique pas de manière universelle à toutes les entreprises, ni même à toutes les usines d’une même entreprises, ce qui peut donner lieu à un désavantage concurrentiel ou à des stratégies de contournement. Une étude du Conseil d’analyse économique, évaluant les effets de cette caractéristique sur les revenus et les émissions de gaz à effet de serre des entreprises industrielles françaises, montre que celles qui sont soumises à cette règlementation ne sont pas pénalisées et réduisent leurs émissions.

Le système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’Union européenne est un dispositif qui ne concerne que les grandes installations émettrices de gaz à effet de serre (GES). Une note du Conseil d’analyse économique cherche à évaluer les effets de ce marché du carbone européen, à la fois sur les revenus et les émissions de GES, sur les entreprises industrielles françaises, selon qu’elles sont soumises ou non à cette règlementation, voire d’une usine à l’autre au sein d’une même entreprise.

Les auteurs montrent que, malgré la hausse du coût de l’énergie due à la règlementation, le SEQE n’a pas désavantagé les entreprises qui y sont soumises : leurs ventes ont augmenté de 5 à 10 % par an par rapport au scénario contrefactuel non-règlementé, tandis que les émissions de CO2 dans leurs usines règlementées ont diminué de 6 à 21 % en moyenne, selon les années.

Les auteurs constatent également que les entreprises réglementées ont transféré une partie de leurs émissions des usines soumises au SEQE vers les usines non réglementées qui leur appartiennent, à hauteur de 1 à 5 %. Même si ce contournement est insuffisant pour contrebalancer l’effet positif du SEQE sur les réductions d’émissions des usines réglementées, le CAE recommande "d'assujettir l'ensemble des établissements de chaque entreprise soumise au SEQE, pour éviter les stratégies d'évitement de la réglementation, et d'encadrer plus strictement les mesures compensatoires au regard des objectifs de réduction de CO2".

Au total, le CAE estime que, grâce au marché du carbone européen, les émissions globales produites en France pour le marché français ont baissé de 3 à 17 % par rapport au scénario contrefactuel non réglementé.

Synthèse par la Doc de Rexecode, accès par le lien ci-dessous.

Estimation de l’effet du marché du carbone européen sur l’industrie manufacturière française
Conseil d'analyse économique - Hélène OLLIVIER, Geoffrey BARROWS, Raphael CALEL, Martin JEGARD, Focus N°101, 15 novembre 2023

Voir aussi :

The Many Channels of Firm’s Adjustment to Energy Shocks: Evidence from France
Banque de France - Lionel FONTAGNE, Philippe MARTIN, Gianluca OREFICE, Document de travail N°929, novembre 2023

La Banque de France examine les stratégies d'adaptation des entreprises industrielles françaises aux hausses des prix de l'énergie sur la période 1996-2019. Face à une augmentation du prix de l'énergie, les entreprises réduisent leur demande d'énergie, améliorent leur efficacité énergétique, augmentent les importations d'intrants intermédiaires et optimisent l'utilisation de l'énergie de leurs unités de production. Elles peuvent également répercuter entièrement le choc des coûts sur leurs prix à l'exportation. Leur production, leurs exportations et l'emploi diminuent en conséquence.

Ces multiples mécanismes d'ajustement font que la baisse des profits est soit non significative, soit faible, soit concentrée sur les entreprises les plus intensives en énergie. Les auteurs constatent également que seules les entreprises capables de s’adapter aux chocs de coût de l’énergie ont survécu.