Après la crise de 2008-2009, la productivité du travail a ralenti. Or ce "décrochage de la productivité du travail perturbe les prévisions de l’emploi". Dans sa dernière note de conjoncture, l’Insee identifie les déterminants de ce ralentissement, ce qui lui permet de construire une nouvelle modélisation de long terme des gains de productivité, et une modélisation plus fiable des prévisions d'emploi à court terme.

Du début des années 1990 à la crise de 2008-2009, la productivité du travail en France a progressé de manière régulière, à un rythme d’environ 1,3% par an. Après une forte chute lors de la crise (-2,6 points par rapport à sa tendance passée), elle a recommencé à croître à partir de 2010, à un rythme cependant inférieur à celui d’avant-crise (0,9% durant la période 2010-2016).

Le ralentissement de la productivité du travail après la crise est en partie expliqué par une allocation du capital moins efficiente.

Les économistes de l'Insee identifient les facteurs déterminants du ralentissement de la productivité post-crise grâce à une décomposition comptable des gains de productivité du travail, en distinguant les contributions inter-branches et intra-branches liées au capital et à l’emploi.

Le ralentissement de 0,5 point s'explique par :
• une allocation moins efficiente du capital vers les branches les plus productives pour 0,2 point ;
• la productivité globale des facteurs (PGF) pour 0,2 point ;
l'allocation du capital par tête pour 0,1 point ;
• l’allocation du travail entre branches ne jouerait aucun rôle.

Après la crise, la baisse de la productivité du travail provient principalement de l’industrie.

Au total, le ralentissement de la productivité du travail des branches marchandes non agricoles après la crise s’explique essentiellement par trois facteurs :

• une contribution de la PGF plus faible dans l’industrie,
• une contribution plus faible de l’intensité capitalistique dans l’industrie,
• une moins bonne allocation du capital dans les services.


Sur la base de cette décomposition comptable, l’Insee construit une nouvelle modélisation en vue de prévoir l’emploi salarié à court terme.

Ce nouveau modèle capte mieux la rupture de tendance de productivité depuis 2008. Le ralentissement étant expliqué à long terme, l'équation de court terme est améliorée. Cette nouvelle modélisation sera donc désormais utilisé par l'Insee dans le cadre de ses prévisions d’emploi à court terme.

D’après le modèle, l’emploi salarié des branches marchandes non agricoles croîtrait sur un rythme moindre en 2018 qu’en 2017 (+163.000 emplois sur un an fin 2018 contre +333.000 en 2017). Ce moindre dynamisme serait lié à la fois à des politiques de l’emploi moins favorable (baisse des emplois aidés) et au ralentissement de la valeur ajoutée.

Ralentissement de la productivité du travail et prévision de l’emploi en France
INSEE, Mikael Beatriz, Anis Marrakchi, Sophie De Waroquier de Puel Parlan, Note de conjoncture, 19 juin 2018