Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
La pandémie de Covid-19 et les restrictions exceptionnelles visant à la contenir ont eu un impact économique que l’on préjugeait important mais que les sources statistiques "officielles" ne permettaient d’estimer qu’avec retard. Instituts statistiques et économistes se sont tournés vers des données à haute fréquence (a minima quotidiennes), inédites ou encore peu exploitées. Des notes récentes illustrent l’intérêt de l’exercice.
• La Banque de France a exploité des indicateurs alternatifs, issus de données dites "ouvertes" (pollution, consommation d’électricité, Google, réseaux sociaux, etc.) pour évaluer au plus près l'effet de la crise sanitaire sur l'activité et le climat conjoncturel. Ces indicateurs, disponibles en quasi "temps réel" pour un grand nombre de pays, permettent de cerner entre autres les préoccupations des internautes et des entreprises, d'identifier de nouveaux comportements notamment en termes de consommation ou de mobilité.
- Des effets massifs du confinement sur l'activité "mesurables par des grandeurs physiques". Par exemple, l’indice Google Mobility estime la baisse de mobilité en France à 85% au moment du confinement ; l’indice OAG Aviation Limited évalue la baisse du nombre de vols au départ de la France pendant la crise à 92%. La pollution de l'air au dioxyde d’azote a aussi fortement baissé, tandis que les nouveaux commentaires Airbnb témoignant de séjours touristiques ont chuté de 99%.
- La situation sanitaire et économique au coeur des préoccupations. Par exemple, l’indice Google Trends Google montre la poussée des recherches sur des "mots clés" relatifs à la pandémie (symptômes, létalité) et des préoccupations sur la situation économique (crise, entreprises, faillites) et personnelle (surendettement, après le confinement). Du côté des entreprises, la communication via Twitter, très intense lors du confinement, n'a eu tendance à se normaliser que récemment.
Ces données doivent toutefois être utilisées avec précaution. Par exemple, les internautes ne sont pas forcément représentatifs de l’ensemble de la population, certaines données doivent être retraitées pour être interprétables, et surtout la plupart ne font pas l’objet d’un traitement harmonisé et n’offrent donc pas les mêmes garanties que les statistiques traditionnelles.
Le suivi économique en période de Covid-19 : l’apport d’indicateurs à haute fréquence
Bulletin de la Banque de France N°231-5, 7 octobre 2020
• Le FMI examine les effets économiques des confinements et de la distanciation physique à partir de données en temps réel sur la mobilité (Google) et l'emploi (offres sur Indeed).
Sur la totalité des 128 pays étudiés, les confinements et la distanciation physique volontaire ont contribué à parts égales à la chute de la mobilité interne pendant les trois premiers mois de l’épidémie. Le constat est similaire pour les offres d'emploi. L'analyse, basée sur un indice de la "dureté" de confinement, montre qu’un confinement précoce, strict et de courte durée serait plus efficace que des mesures plus souples mais prolongées. Les données révèlent également un impact hétérogène sur la mobilité par groupes d'individus les jeunes étant davantage pénalisés.
The Great Lockdown, Dissecting the Economic Impact
FMI, World Economic Outlook, chapitre 2, octobre 2020
• Le Conseil d’analyse économique étudie les dynamiques de la consommation et de l’épargne pendant la crise, en s'appuyant sur les données bancaires du Groupement des Cartes Bancaires CB et du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
A partir des données de transactions par cartes bancaires (environ 60 % des transactions), le CAE construit un baromètre de la consommation des ménages. Les données des comptes bancaires Crédit Mutuel Alliance Fédérale de 300.000 ménages anonymisés permettent également de disposer d’informations sur leurs dépenses via tous types de paiement et sur la dynamique de l’épargne (soldes des comptes courants mais aussi des comptes d’épargne, assurance-vie…). Cette utilisation inédite de données bancaires microéconomiques en temps réel permet de mieux comprendre les effets de la crise sur les ménages français, montrant notamment l’hétérogénéité des situations selon les secteurs d’activité et les catégories de ménages.
Dynamiques de consommation dans la crise : les enseignements en temps réel des données bancaires
Conseil d'analyse économique, Focus N°49, octobre 2020
• Selon Didier BLANCHET et Jean-Luc TAVERNIER (Insee), "il n’y a pas de concurrence mais une complémentarité entre les sources statistiques traditionnelles et les nouvelles sources de données mobilisées depuis le début de la crise sanitaire, les secondes ne ringardisent pas les premières". Mais cette complémentarité des différents outils n’était pas acquise d’entrée de jeu. La crise du Covid aura constitué un contexte propice à des avancées de ce point de vue.
Mesurer l’activité durant la crise sanitaire : premiers éléments de bilan
Didier BLANCHET, Jean-Luc TAVERNIER – Revue de l’OFCE N°166, octobre 2020
Synthèse réalisée par la Documentation de Rexecode, pour accéder aux notes citées suivre les liens sous chaque résumé