Etant donné les risques de perte de compétitivité qu’une taxe carbone mal calibrée ferait peser sur l’industrie française, ses modalités d’application seront cruciales. Le champ de la taxe, selon qu’il inclura ou non les installations soumises au marché européen du carbone aura une incidence déterminante sur la viabilité de certains secteurs.

Le Comité pour la fiscalité écologique a rendu publiques le 2 avril ses premières pistes de réflexion, parmi lesquelles "un instrument fiscal lié au carbone visant à modifier les comportements liés à la production et à la consommation".

Coe-Rexecode a évalué les impacts possibles d’une taxe carbone domestique sur les principaux secteurs industriels selon trois taux de taxe. Le choix du champ de la taxe, selon qu’il exclura ou inclura les installations des secteurs participant au marché européen d’échange de quotas d’émissions de CO2 (ETS), aura une incidence déterminante sur la viabilité de certains secteurs très consommateurs d’énergie.

Dans un scénario "médian" avec un taux de taxe de 20 euros par tonne de CO2 et selon les secteurs industriels considérés, l’introduction d’une taxe carbone domestique pourrait coûter aux entreprises :
• de 0% de leur excédent brut d’exploitation, pour un secteur comme le ciment, dans l'hypothèse où les installations soumises à l’ETS seraient exclues du champ de la taxe,
à près de 61 % de leur excédent brut d’exploitation, dans le cas de la sidérurgie, dans l'hypothèse où les installations soumises à l’ETS seraient inclues dans le champ de la taxe.

Nos conclusions

Une taxe carbone domestique diminuerait effectivement les émissions de CO2 en France et générerait des recettes budgétaires supplémentaires. Mais elle engendrerait aussi une hausse des coûts de production dont les effets récessifs et inflationnistes se feraient sentir au niveau national. Selon le taux et l’assiette retenus, elle pourrait également accélérer la désindustrialisation en faisant peser sur certains secteurs industriels vulnérables une pression insupportable.

Nos recommandations :

1) Envisager un taux compris entre 7 et 20 euros (on notera qu’un taux de 12 euros génèrerait un peu plus de 3 milliards d’euros la première année, ce qui est en ligne avec le financement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) ;

1) Bien articuler la taxe carbone avec l’ETS, en laissant hors du champ de la taxe les installations participant déjà au marché du carbone afin d’éviter l’addition des coûts et la disparition d’activités entières. Les soumettre à une taxe carbone domestique leur ferait, en effet, subir un double prélèvement ;

2) Mettre en place des mesures d’accompagnement spécifiques vers les secteurs économiques les plus fortement pénalisés par cette taxe pour en limiter l’effet récessif et faciliter la transition énergétique.

Coe-Rexecode présentera les conclusions de cette étude au Comité pour la Fiscalité Ecologique le 16 mai prochain.