Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
F. Hollande et N. Sarkozy partagent, à raison, un même objectif : revenir à l'équilibre budgétaire. Mais leurs stratégies divergent : le programme socialiste prévoit 40 milliards d'euros de dépenses publiques et de prélèvements obligatoires de plus que le programme de droite, une grande partie de l'écart tenant aux charges sociales. Quel est l'impact de cet écart sur la croissance et la compétitivité de la France ?
François Hollande et Nicolas Sarkozy partagent un même objectif : celui de revenir à l'équilibre budgétaire à la fin du prochain quinquennat. Ils ont raison. La question de choisir entre austérité et croissance a aujourd'hui peu de sens puisque le retour à l'équilibre est incontournable. Au-delà des postures d'allégeance à tel ou tel camp exprimées dans différentes tribunes récentes, il serait surtout utile que les économistes recherchent ensemble la meilleure manière d'articuler ces objectifs et de faire des propositions concrètes pour la croissance française et européenne.
En réalité, sur le plan économique, une différence importante entre les candidats réside dans leurs stratégies de dépenses et de prélèvements obligatoires. Le programme socialiste prévoit 40 milliards d'euros de dépenses publiques et de prélèvements obligatoires de plus que le programme de droite, une grande partie de l'écart tenant aux charges sociales : hausse pour l'un, baisse pour l'autre. Il faut s'interroger sur l'impact que cette différence de prélèvements aurait sur notre croissance économique, compte tenu du niveau actuellement très élevé de notre dépense publique et de notre pression fiscale et sociale.
Les données invoquées par les économistes qui soutiennent François Hollande au sujet de notre compétitivité sont d'ailleurs erronées. Ainsi, imputer la perte de compétitivité de l'économie française à une « erreur stratégique » des cinq dernières années est tout simplement faux. Si, de fait, la part des exportations françaises dans les exportations totales de la zone euro a fortement reculé entre 2000 et 2011, l'essentiel de ce recul s'est produit au début des années 2000, bien avant 2007. Cette part a reculé de 3,1 points de 2000 à 2007. Entre 2007 et 2011, le recul a été ramené à 0,5 point et la part de marché s'est même quasiment stabilisée depuis 2010.
D'où est donc venue la rupture de compétitivité de l'an 2000 ? Il est assez simple de comprendre que, en économie, les coûts et les prix comptent tout autant que les produits. L'enquête d'Eurostat, qui compare les coûts horaires du travail en Europe, montre que le coût moyen de l'heure de travail (salaires chargés) pour l'ensemble de l'économie française est de 12 % supérieur à celui de l'Allemagne. Surtout, en dix ans, ces coûts ont évolué très différemment entre les deux pays : +40 % environ depuis 2000 pour la France, contre +18 % seulement pour l'Allemagne. Comme pour les parts de marché, cet écart d'évolution a été le plus important au début de la dernière décennie : 11 % d'écart sur la période de 2000 à 2004, 6 % de 2004 à 2008 et moins de 2 % de 2008 à 2011. C'est cette divergence d'évolution des coûts qui a rompu l'équilibre des compétitivités. Elle est due à des politiques du travail opposées : « 35 heures » d'un côté, réformes Schröder de l'autre. Une telle divergence dans une Union monétaire est très dangereuse pour la stabilité et la croissance, comme vient de le rappeler le président de la BCE, Mario Draghi.
Face à cette divergence des coûts et des compétitivités, la stratégie gagnante pour la France est claire : à long terme, davantage de recherche et d'innovation, de réactivité du travail et de concurrence sur les marchés des biens et services ; à moyen terme, davantage de « travailler ensemble » pour la compétitivité dans chaque entreprise (c'est l'objectif des accords compétitivité-emploi) ; à court terme, un recalage de nos coûts par rapport à nos concurrents par la baisse des charges pour amorcer un cercle vertueux compétitivité-croissance-emploi.
C'est cette politique de compétitivité qui a été engagée. Elle doit être poursuivie. Le candidat élu devrait même l'amplifier et trouver le courage d'affronter les vérités économiques en adoptant, pour la France, les réformes que d'autres leaders européens, de gauche ou de droite, ont déjà menées ou amorcées, chacun à sa façon : Gerhard Schröder en Allemagne il y a dix ans, David Cameron au Royaume-Uni au cours des dernières années, Mario Monti en Italie en ce moment même.
La reconvergence est la première initiative de croissance à laquelle la France doit œuvrer, pour elle-même et pour l'Europe.
Tribune de Michel Didier, président de Coe-Rexecode, publiée dans Les Echos du 4 mai 2012 : en ligne sur le site des Echos
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