En 2022, la durée annuelle effective du travail des salariés à temps complet reste plus basse en France que dans les autres pays de l'Union européenne hors Finlande, d’après les calculs de Rexecode réalisés sur les données de l’enquête Forces de travail d’Eurostat. Cette nouvelle estimation est la première réalisée après le changement de méthodologie de l’enquête intervenu en 2021 afin notamment d'améliorer la comparabilité des données.

La durée annuelle effective du travail pour les salariés à temps complet est l'indicateur pertinent pour la comparaison internationale 

Rexecode réalise depuis 2012 une comparaison de la durée du travail dans les pays de l'Union européenne à partir de données extraites spécialement par Eurostat de l'enquête européenne sur les Forces de travail. D'un point de vue macroéconomique, autrement dit pour mesurer la contribution effective à la production, l’indicateur pertinent est la durée annuelle effective du travail pour les salariés à temps complet. La durée du travail effective est en effet la durée du travail réellement effectuée sur l'année, contrairement à d’autres notions de durée, comme la durée hebdomadaire habituelle, qui ne prennent pas en compte les périodes d’absence (pour congé, maladie, etc.). La comparaison réalisée sur les salariés à temps complet est celle qui rend le mieux compte du cadre réglementaire, contrairement à d’autres champs (temps partiel, non-salariés) pour lesquels la durée résulte également d’autres facteurs, notamment des comportements des entreprises et des salariés (temps partiel choisi ou subi par exemple).

De 2012 à 2022, la France est un des pays européens où la durée effective annuelle du travail des salariés à temps complet est la plus basse

La dernière mise à jour porte sur l'année 2022. Elle intègre les changements méthodologiques apportés en 2021 par Eurostat à l'enquête sur les Forces de travail afin notamment de corriger des risques de comparabilité entre pays identifiés pour les précédentes enquêtes. Elle confirme que la France est, après la Finlande, le pays où la durée annuelle effective du travail des salariés à temps complet est la plus faible. Avec l’Allemagne, l’écart s’établit à 122 heures, soit l’équivalent de trois semaines de travail. L'année 2022 reste une année de crise, encore perturbée par la pandémie de Covid-19 et par la crise énergétique, mais ces facteurs ne constituent pas a priori des sources de biais dans les comparaisons entre pays dans un sens plutôt que dans l’autre.

Avec moins de temps partiel, la durée du travail des salariés français dépasse celle des européens du nord 

La mesure des durées du travail moyennes sur l’ensemble des salariés (temps complet et temps partiel) apporte un éclairage complémentaire en ce qu’elle intègre les effets des comportements des salariés et des entreprises en matière de recours au temps partiel et à sa durée moyenne. La France affiche une part de l’emploi salarié à temps plein relativement élevée, supérieure à celles de la plupart des pays d’Europe du nord, et donc un moindre recours relatif au travail à temps partiel.

La durée annuelle effective moyenne du travail sur l’ensemble des salariés en France, tout en demeurant parmi les plus basses de l’UE, est supérieure à celle de l’Allemagne et des pays d’Europe du nord lorsque le travail à temps partiel est pris en compte. Par rapport à 2019, on note une baisse de la part de temps partiel subi, particulièrement en France, dans un contexte de dynamisme généralisé du marché du travail en Europe.

Ces effets de structure interviennent également lorsque l’on considère la durée effective de travail de l’ensemble des personnes en emploi: la France se distingue par une durée du travail des non-salariés (notamment les indépendants) relativement élevée en comparaison européenne.

La comparaison de la durée du travail actuelle avec celle de la période pré-Covid pose des difficultés

Le changement de méthodologie de l’enquête des Forces de travail d’Eurostat intervenu en 2021 améliore la comparabilité des données entre pays mais constitue aussi une rupture qui empêche de comparer les durées de travail avant et après la crise sanitaire, et donc d’identifier les éventuels effets de la pandémie et des changements de comportement qu’elle a pu déclencher sur la durée du travail.

Dans le cas spécifique de la France, l’Insee a mis en place des dispositifs permettant de raccorder les séries obtenues avec l’enquête Emploi avant et après le changement de méthodologie. Les estimations réalisées par l’Insee aboutissent à une stabilité de la durée effective du travail pour les salariés à temps complet entre 2019 et 2022.

L’évolution du rapport au travail qui a eu lieu au moment de la crise sanitaire, notamment le recours accru au télétravail, interroge toutefois le concept de durée effective du travail, et notamment dans un cadre déclaratif tel que celui de l’enquête sur les Forces de travail.