Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Le Conseil d’analyse économique estime que les impôts sur la production pénalisent particulièrement le secteur productif français. Le CAE appelle à supprimer en priorité la C3S puis la CVAE, des impôts jugés "nocifs" pour la productivité et la compétitivité des entreprises françaises.
Selon une Note du Conseil d’analyse économique, la France se distingue par le nombre et le niveau élevé de ses impôts sur la production.
Ils représentent 0,5% de la valeur ajoutée des entreprises en Allemagne et 3,6% en France, le plus haut niveau en Europe hors Grèce. Or ces impôts affectent les décisions des entreprises concernant les modes de production et les prix et peuvent donc pénaliser leur productivité et leur compétitivité. Ils expliqueraient, avec d’autres facteurs, "la relative atrophie du secteur productif français, en particulier des TPE et PME".
• Le CAE se concentre sur les trois grands impôts sur la production: la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), assise sur le chiffre d’affaires des entreprises (3,8 Mrds€ en 2019) et qui n’existe dans aucun autre pays européen, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE, 14 Mrds€) et la cotisation foncière des entreprises (CFE, 6,5 Mrds€ en 2016). Les auteurs se concentrent donc sur trois catégories d'assiettes d'impôts sur la production : le chiffre d'affaires, la valeur ajoutée et le foncier. Ils ne prennent pas en compte les impôts sur le travail ou le capital.
• En s'appuyant sur des données individuelles d'entreprises, les auteurs recommandent de supprimer en priorité la C3S. Cette taxe réduit la productivité, ce qui entrainerait une perte de PIB estimée entre 360 à 720 millions d’euros, soit une "perte sèche pour l’économie de 10 à 20% des recettes fiscales". Elle réduit la probabilité de survie des entreprises et affecte leur compétitivité, en jouant comme une taxe sur les exportations et une subvention aux importations. La C3S réduirait ainsi les exportations de 1%.
Particulièrement nocive à cause de son "effet de cascade", la C3S touche directement les entreprises avec un CA de plus de 19 millions d’euros mais pénalise aussi indirectement les entreprises non redevables, à cause d’une augmentation de leurs coûts. Elle pousse aussi les entreprises à revoir leurs stratégies d’approvisionnement en se tournant vers des fournisseurs étrangers non taxés, ou bien peut inciter leurs fournisseurs à se délocaliser. Sa suppression, selon les auteurs, pourrait réduire le déficit commercial manufacturier français de 14% (borne haute de leur estimation).
• Le CAE préconise de programmer dans un deuxième temps la suppression de la CVAE. Avec, en contrepartie, l’affectation aux collectivités locales d’une fraction d’impôt national (TVA par exemple) avec la même clé de répartition qu’actuellement (emploi et foncier local), calculée au niveau des collectivités locales bénéficiaires. En revanche, selon les auteurs, la CFE ne semble pas causer de distorsions majeures.
Au total, selon le CAE, l’allégement proposé représenterait 1,4 point de valeur ajoutée des entreprises.
Les impôts sur (ou contre) la production
Conseil d’analyse économique, Philippe MARTIN, Alain TRANNOY,
Les notes du Conseil d’analyse économique N°53, juin 2019
Impôts sur la production : quel impact sur la compétitivité ? Analyse de trois taxes sur données d’entreprises
Conseil d’analyse économique, Camille URVOY, Focus N°35, juin 2019
Voir aussi :
La productivité en France de 2000 à 2015 : poursuite du ralentissement et hausse modérée de la dispersion entre entreprises
INSEE, L'économie française - Comptes et dossiers, édition 2019, juillet 2019