Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Le Fonds monétaire international (FMI), dans son dernier rapport de stabilité financière, estime à 40% le montant des dettes corporate à risque dans huit grands pays. Ce gonflement de la dette des entreprises amplifierait l’effet d’un ralentissement économique. Le FMI recommande la mise en œuvre de mesures macro-prudentielles, encore peu développées pour les secteurs des entreprises et des institutions financières non bancaires.
Le FMI évalue le niveau et la qualité du crédit des entreprises dans son dernier rapport sur la stabilité financière dans le monde. Il conclut que la dette à risque (dette des entreprises dont le bénéfice est insuffisant pour couvrir les paiements d'intérêts) et la dette spéculative sont déjà élevées dans plusieurs grandes économies. La dette à risque pourrait atteindre 19.000 milliards de dollars en 2021, soit près de 40% de la dette totale des entreprises dans les grands pays, dans un scénario de ralentissement économique fort (deux fois moins grave que la crise financière de 2008-2009).
Les risques sont globalement élevés mais varient d’un pays à l’autre :
• En Chine, la dette globale des entreprises est très élevée. En outre, la dette à risque chinoise s'avère très sensible aux détériorations de la croissance et des conditions de financement (en raison d'une part importante de la dette spéculative). Elle dépasserait les niveaux post-crise dans le scénario de ralentissement économique du FMI.
• En Europe, les progrès en matière de désendettement depuis la crise de la dette de la zone euro ont été considérables. La dette globale des entreprises et la dette à risque ont diminué dans les principales économies. Néanmoins les niveaux de dette spéculative et de dette à risque restent élevés dans plusieurs pays, principalement à cause des PME. Dans le scénario défavorable du FMI, la dette à risque approcherait les niveaux de crise en France, en Espagne et au Royaume-Uni. Les petites et moyennes banques - encore nombreuses dans plusieurs pays - sont en outre largement exposées aux PME.
• Aux Etats-Unis, le FMI souligne que les entreprises ont augmenté leur prise de risques financiers, souvent par endettement. La croissance rapide des segments risqués des prêts à effet de levier et du crédit privé est particulièrement préoccupante. L'évolution récente de la base d'investisseurs vers les marchés des capitaux et les sociétés non bancaires a été propice à ces évolutions.
Si le niveau de la dette à risque revenait au niveau de celui observé au lendemain de la crise financière mondiale, les institutions financières bancaires ou non bancaires fortement exposées aux entreprises très endettées pourraient subir des pertes significatives. En retour, la réduction du crédit aux entreprises ne ferait que renforcer l’ampleur du ralentissement.
Les décideurs, selon le FMI, devraient s'attaquer aux vulnérabilités des entreprises avant le prochain ralentissement économique, notamment
• en élargissant le périmètre de règlementation et de surveillance pour inclure les intermédiaires financiers non bancaires
• en renforçant la surveillance des banques régionales
• en améliorant la collecte de données sur les expositions transfrontalières
• en développant des outils prudentiels pour les entreprises fortement endettées
• en limitant les possibilités de déduire fiscalement les frais d’intérêts, ce qui encourage les emprunts excessifs par les entreprises.
Global Corporate Vulnerabilities – Riskier Business
Global Financial Stability Report – Lower for Longer
FMI, 16 octobre 2019
Voir aussi :
Selon France Stratégie, la part des entreprises zombies (âgées d’au moins dix ans, déficitaires depuis au moins trois ans) en France est relativement faible : sur la période 2013-2016, elle oscille entre 3,9% et 4,6% du total des entreprises, contre 5% en moyenne dans les pays de l’OCDE. France Stratégie estime que la faible proportion des entreprises zombies est le signe que les procédures de défaillance jouent plutôt bien leur rôle.
Les procédures de défaillance à l'épreuve des entreprises zombies
France Stratégie - Haithem BEN HASSINE, Catherine LE GRAND, Claude MATHIEU
Note d’Analyse N°82, octobre 2019