Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Chargés par le gouvernement d’examiner les fragilités du modèle de financement français des médicaments, les experts de la mission "Régulation des produits de santé" émettent des recommandations pour le faire évoluer, grâce à un engagement de l’ensemble des acteurs concernés, et permettant de concilier les objectifs sanitaires, industriels, écologiques et budgétaires.
Le rapport de la mission "Régulation des produits de santé", commandé par la Première Ministre et publié le 29 août, identifie des pistes garantissant l’accès des patients à tous les produits de santé - médicaments et dispositifs médicaux (prothèses, pansements, etc.), matures ou innovants. La mission s’interroge également sur la pérennité de l’accès aux produits de santé : maîtrise des dépenses publiques et soutenabilité du système de protection sociale, relocalisation de produits de santé stratégiques dans un objectif de souveraineté sanitaire, décarbonation, attractivité de la France pour la recherche et l’industrie*.
Le rapport constate que le mode de financement et de régulation des produits de santé français est désormais fragile à plusieurs égards, la crise sanitaire du Covid-19 ayant joué le rôle d’accélérateur : pénuries sur les médicaments matures, décalage d’accès aux médicaments innovants avec les voisins européens, et depuis deux ans une envolée "jamais vue" des dépenses de produits de santé – sur fond de très fort développement de thérapies innovantes coûteuses.
La France se singularise des autres pays comparables par l’activation privilégiée du levier prix parmi l’ensemble des outils de régulation. Les effets des baisses de prix ont été particulièrement importants pour les médicaments anciens et peu onéreux, aboutissant à des situations de rentabilité insuffisante pour les acteurs industriels, ce qui a pu favoriser les délocalisations et les difficultés d’approvisionnement.
Pour sortir d'un système qu'elle qualifie de "mal adapté", la mission préconise un engagement de tous les acteurs concernés.
• Du côté des industriels, elle plaide notamment pour une révision de la clause dite de sauvegarde (une contribution due par les groupes pharmaceutiques lorsque les dépenses de médicaments dépassent un seuil légal), aux montants globaux qu’elle estime trop importants, et pour des engagements en matière d'approvisionnement et d'investissements.
• Du côté des patients et des médecins, elle suggère une sensibilisation à la "sobriété médicament" ou l’accélération de l’usage des logiciels d’aide à la prescription. Plutôt que de trop se focaliser sur les questions de prix des médicaments (déjà parmi les plus bas de l’OCDE), le rapport recommande "d'agir sur les volumes, la qualité et la pertinence des prescriptions". Les marges financières concernent également la distribution, qui représente environ 20% du coût des produits de soins pour la Sécurité sociale.
Synthèse par la Doc de Rexecode, accès au document par le lien ci-dessous
Pour un New Deal garantissant un accès égal et durable des patients à tous les produits de santé
Mission "Régulation des produits de santé", 29 août 2023
Le rapport cite à plusieurs reprises l’étude de Rexecode, Enjeux macroéconomiques de la régulation économique du médicament, publiée en juillet 2023
Cette note d’Olivier Redoulès (en accès libre) met en lumière les deux difficultés majeures en matière d’économie du médicament et de santé publique en France : un accès aux médicaments plus contraint et une attractivité industrielle moins favorable. La régulation économique du médicament a certes permis d'en baisser le coût pour les patients et plus encore pour les comptes publics, mais elle a contraint les marges et les investissements du secteur, pénalisant la production en France. Moins attractif, le marché français est plus exposé à des pénuries d'approvisionnement, potentiellement coûteuses sur le plan sanitaire et économique.