Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Les débats à l’occasion de la présidentielle 2017 sur la lutte contre le chômage donnent lieu à des propositions d’évolution du temps de travail. France Stratégie ne prend pas position mais veut clarifier le débat. Augmentation, réduction ou suppression de la durée légale du travail : il faut "avant tout veiller à maîtriser les coûts salariaux unitaires".
En France le chômage est structurellement élevé et le taux d’activité progresse peu depuis 10 ans.
Selon les calculs de France Stratégie d’après les données de l’Enquête sur les forces de travail d’Eurostat, la France est moins performante que la moyenne des six pays européens les mieux classés*, avec un taux de chômage deux fois plus élevé et un taux d’activité sept points en-deçà. Concernant la qualité des emplois la France est à un niveau "inférieur ou comparable".
Le temps de travail est à l’intersection des différents enjeux du marché du travail : activité, chômage, qualité de l’emploi.
Or depuis 1990, la politique française du temps de travail a connu des orientations diverses, voire contradictoires, coûteuses pour les finances publiques.
Définir une politique du temps de travail efficace suppose de clarifier son objectif principal :
• Accroître le taux d’activité :
Par le recours au temps partiel et au cumul formation-emploi et emploi-retraite.
• Améliorer la qualité de l’emploi :
Grâce à l’aménagement des temps de travail. Les exemples étrangers de job sharing montrent que des marges de manœuvre existent en France.
• Réduire le chômage :
Par le levier de la durée du travail - avec un impératif : "freiner l'évolution des coûts salariaux unitaires" pour gagner en compétitivité.
Cet ajustement du temps de travail peut prendre deux formes :
• La baisse de la durée légale du travail
Elle peut être vue comme un moyen de partager le travail :
- A court terme, elle peut permettre de créer des emplois et de faire baisser le chômage.
- A long terme, elle doit être associée à une réorganisation des méthodes de travail permettant de gagner en productivité. Elle doit aussi s'accompagner impérativement d'"une forme de modération salariale".
• L'augmentation de la durée du travail
Elle peut être un moyen de réduire les coûts salariaux unitaires qui pèsent sur l'emploi :
- A court terme, elle risque d’entraîner une hausse du chômage, car les entreprises ajusteront leur cible de main d’oeuvre à la baisse, surtout en cas de conjoncture déprimée.
- A moyen terme, l’effet peut s’inverser, à condition de maîtriser les coûts salariaux unitaires avec une hausse des salaires inférieure à celle de la durée du travail.
Mais l’absence de contrepartie salariale pourrait avoir aussi des effets difficilement mesurables "sur la motivation des salariés et donc sur leur productivité".
2017/2027 - Quelle politique du temps de travail ?
France Stratégie, Actions critiques, janvier 2017
par Amandine Brun-Shammé et Fabrice Lenglart
* Allemagne, Autriche, Danemark, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède