Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Deux notes récentes du FMI et de la DG Trésor partagent le même constat: il est impératif d'accélérer la transition énergétique et donc le découplage entre activité économique et émissions de gaz à effet de serre pour parvenir à limiter d'ici 2050 le réchauffement climatique mondial sous 2°C par rapport à l'ère préindustrielle. Cette accélération aura un coût macroéconomique à court terme sur le montant duquel la littérature ne permet pas de dégager un consensus, si ce n'est qu'il est inférieur à la facture à long terme de l'inaction.
• Le FMI consacre un chapitre de ses dernières Perspectives de l'économie mondiale (WEO) à l'évaluation des impacts macroéconomiques à court terme des politiques de décarbonation.
D'ici la fin de la décennie, l'économie mondiale devra émettre 25% moins de CO2 qu'en 2022 pour avoir une chance d'atteindre les objectifs fixés lors de la conférence de Paris de 2015 sur les changements climatiques (COP21). Parce que la transition énergétique nécessaire pour accomplir cela doit être rapide, cela implique forcément des coûts à court terme.
Bien qu'il y ait peu de consensus sur les conséquences macroéconomiques attendues à court terme des politiques climatiques, le message central de ce chapitre est que si les bonnes mesures sont mises en place immédiatement et déployées progressivement ces huit prochaines années, les coûts resteront gérables et bien inférieurs aux coûts à long terme de l'inaction. Toute mesure de report, option évoquée notamment en raison de la forte inflation actuelle, aboutit à augmenter le coût final, tant en matière d'inflation que de croissance.
Selon la vitesse à laquelle la production d'électricité peut passer à des technologies à faible émission de carbone ces coûts seraient de l'ordre de -0,15 à -0,25 points de croissance du PIB et de +0,1 à +0,4 point d'inflation par an par rapport à la référence, avec des politiques budgétaires neutres. Ces chiffres recouvrent des effets régionaux très hétérogènes. Afin d'éviter d'amplifier ces coûts, il est important que les politiques climatiques et monétaires soient crédibles. Faire du "Stop-and-go" ou tergiverser davantage ne fera qu'aggraver le bilan.
Near-Term Macroeconomic Impact of Decarbonization Policies
WORLD ECONOMIC OUTLOOK (FMI) 2022, octobre, ch.3, pp. 71-95
• Une note de la DG Trésor, partage le constat du FMI, observant que l'atteinte des objectifs climatiques nécessitera une réduction plus rapide et massive des émissions et donc, pour préserver la croissance, une amplification du découplage entre émissions de gaz à effet de serre et activité économique, y compris sur les émissions importées.
Ce découplage implique une hausse du coût relatif des émissions de carbone et une forte augmentation des investissements dans la décarbonation. Si l'effet de la transition écologique sur la croissance économique reste incertain malgré le nombre croissant de travaux sur la question, un consensus se dégage sur le fait que son coût à court terme serait bien inférieur au coût à long terme de l'inaction "qui pourrait représenter au-delà de –15% du PIB mondial en 2050 pour une hausse de la température de 2 à 3°C".
Le succès de la décarbonation dépendra de la mise en place de politiques publiques adéquates visant à réorienter les investissements et à modifier les comportements des acteurs économiques tout en accompagnant le changement et en protégeant les plus vulnérables.
Croissance et décarbonation de l'économie
Pierre-Louis Girard, Claire Le Gall, William Meignan, Philippe Wen
TRESOR-ECO (Direction générale du Trésor) 2022, N°315, octobre, 12 p.