Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne, est entré en phase de test le 1er octobre 2023. Le MACF, dont l'objectif est de compenser pour les producteurs européens l'écart de taxation des émissions de CO2 avec leurs concurrents mondiaux, devrait à terme à remplacer les quotas gratuits. Des fédérations industrielles et plusieurs études, dont une note Rexecode, alertent sur les risques pour la compétitivité des usines européennes si les défauts de conception de cette taxe carbone ne sont pas corrigés.
Taxe carbone aux frontières : un problème pour l'industrie européenne
FRANCE CULTURE, Le journal de l'éco, 3/10/2023
Présentée comme la solution pour limiter la concurrence des importations de produits forts en carbone et non soumis à des droits à polluer aussi élevés que dans l'Union Européenne, la taxe carbone aux frontières sera payée par les entreprises européennes et pourrait inciter à la délocalisation.
C’est ce que disent plusieurs rapports et centre de réflexion, notamment la Fabrique de l’Industrie, rapport Pisani-Ferry Mahfouz, remis en juin à Elizabeth Borne, et l’institut Rexecode pour qui l’ajustement carbone aux frontières menace carrément l’objectif de réindustrialisation. Des craintes pour l'industrie en aval. Le problème, c'est que l'entreprise européenne qui aura payé la taxe carbone pour importer disons de l'acier chinois, va la répercuter sur le prix de vente de sa tôle ondulée par exemple, et donc l'industriel européen en aval sera pénalisé, or lui n'est pas protégé par le MACF explique Raphaël Trotignon, qui a mené l'étude pour Rexecode. "L'industrie aval, elle, elle subit une augmentation de coût, typiquement les fabricants de voiture, de machines, d'équipements pour la construction, donc pour eux c'est un choc de coût qui n'est pas compensé, c'est une perte de compétitivité, donc ils vont devoir prendre sur leur marge, moindre profitablité, donc plus de difficultés à investir... Dans le pire des cas, fermeture d'usine et ouverture d'usines à l'étranger, pour réimporter sans payer d'ajustement carbone...". Rexecode a évalué l'impact que pourrait avoir le MACF sur le prix de l'acier, et il estime l'augmentation à 20% d'ici 2034, car parallèlement à ce mécanisme, les industriels de l'acier à qui on avait donné des quotas d'émission carbone gratuits (pour ne pas trop les pénaliser), ne pourront plus compter dessus (ces quotas doivent disparaitre en 2034). - @ Journal de Anne Laure Choin, reportage Marie Viennot
Pourquoi la taxe carbone aux frontières inquiète l’industrie
La nouvelle taxe carbone aux frontières vient d’entrer en vigueur en Europe. Sans incidence financière pour le moment. Mais les industriels contestent un risque futur de délocalisation. Mais le MACF a un effet pervers, dénoncé depuis des mois par toutes les grandes fédérations patronales industrielles européennes et françaises, et que résume Cyril Mounier, délégué général d’Aluminium France: les industriels européens qui transforment des métaux pour produire des produits manufacturés vont subir à la fois la hausse des coûts de production du métal produit en Europe, avec la fin des crédits gratuits, et celle du métal importé, avec le MACF. Plus globalement, une bonne dizaine de filières industrielles sont susceptibles d’en faire les frais, selon un impact global estimé dans une étude récente de Rexecode, l’institut français d’études économiques privé proche des milieux patronaux. Rexecode fait remarquer que si les entreprises doivent acheter massivement des crédits carbone au prix fort, cela annulerait les effets attendus de la prochaine suppression de la CVAE promise par le gouvernement aux entreprises pour améliorer leur compétitivité. Rexecode met donc en garde: en augmentant ainsi le coût de la transformation des produits de base, le système est une incitation à la délocalisation des chaînes aval. @ André Thomas
Pourquoi l'industrie cimentière défend la taxe carbone aux frontières ?
Une partie des industriels français est vent debout contre la mise en place du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, dont elle craint les failles. Pour l’industrie cimentière, il est pourtant une façon de rétablir son déséquilibre avec la concurrence étrangère. "Nous ne sommes pas dans la même situation que les fabricants d'électroménager", reconnaît Bruno Pillon, le président de France Ciment qui dirige aussi Heidelberg Materials France. Le ciment fait partie des six produits de base, avec l’acier, l’aluminium, les engrais ou l’électricité, directement visés par le mécanisme. L’Union européenne a choisi de modifier son arsenal pour défendre les entreprises de ces secteurs contre la concurrence de produits étrangers non soumis à des prix du carbone. Au lieu de distribuer des quotas gratuits aux fabricants européens, les importations de produits de base seront soumises à un prix du carbone à l’entrée sur son marché. Mais le champ reste limité, avec seules 1,2% des importations françaises en valeur soumises au MACF, selon les calculs de Rexecode. @ Solène Davesne
Taxe carbone aux frontières : quatre questions sur ce dispositif qui entre en phase de test
Une phase d’essai déclarative sans taxation, avant une réelle entrée en vigueur en 2026. Le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), dit taxe carbone aux frontières, entre dimanche 1er octobre dans sa première phase. (4) Pourquoi les entreprises craignent-elles une distorsion de concurrence ? Les entreprises européennes craignent d’être pénalisées, notamment dans l’industrie, avec un risque de déséquilibre entre les prix des produits européens et non européens. C’est particulièrement le cas pour les produits transformés, non concernés par le MACF. Un rapport remis en mai dernier à Elisabeth Borne par l’économiste Jean Pisani-Ferry pointait le risque d’aggravation des problèmes de distorsion de concurrence pour les exportateurs. "Une voiture fabriquée dans l’UE avec de l’acier européen subira un surcoût à raison de son contenu en carbone, ce ne sera pas le cas pour les voitures fabriquées en Chine", relevait le rapport. "Avec ce nouveau système, on va faire payer les utilisateurs. Ce ne sont pas les Chinois ou les Turcs qui vont payer la taxe aux frontières, c’est ça qui peut-être mal compris par le grand public ou même par les décideurs", déplorait en juin dernier dans un entretien à l’AFP Raphaël Trotignon, coauteur avec Olivier Redoulès d’une étude publiée par l’institut Rexecode intitulée "L’architecture de l’ajustement carbone aux frontières menace l’objectif de réindustrialisation". @ Julien Chabrout avec AFP
Le périlleux crash-test de la taxe carbone aux frontières
À partir du 1er octobre, l’Europe va tester à blanc son nouveau mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Louable mais imparfait, voire ubuesque, celui-ci fait craindre une hémorragie industrielle. Le principe ? Pour éviter la délocalisation des activités les plus polluantes, l’Europe accordait jusqu’à présent, généreusement, des quotas gratuits aux industriels les plus exposés à la concurrence internationale. Depuis plusieurs années, la Commission européenne cherche à les remplacer. À l’entrée de leurs produits sur le marché unique, les importateurs devront s’acquitter de certificats carbone, dont le tarif sera calculé sur celui des quotas européens. Si une taxe carbone existe déjà dans le pays d’origine, l’importateur ne paiera que la différence. "L’idée est louable, mais comporte un risque important dans sa mise en œuvre", reconnaît l’économiste Raphaël Trotignon, de Rexecode. Car ce système, que la France a soutenu et défendu, est loin d’être parfait. Il ne s’appliquera qu’à six secteurs : le ciment, l’acier, l’aluminium, les engrais, l’hydrogène et l’électricité, ainsi qu’à quelques rares produits et semi-produits simples, comme les vis et les boulons. Soit 1,2% des importations françaises seulement. Les prix des matières premières des industriels européens vont donc augmenter, quel que soit le lieu d’approvisionnement. "Le diable se cache dans les détails, reconnaît Philippe Darmayan l’ancien directeur France d’ArcelorMittal qui a fait partie des grands défenseurs du MACF. Heureusement, l’Europe a pris une option prudente: 2034, cela laisse le temps d’adapter le mécanisme." Tant que le mécanisme n’est pas en place, il est difficile d’anticiper tous les effets de bord. Rexecode évalue à 4 milliards d’euros environ les surcoûts pour l’industrie française en 2034, un choc finalement pas si insurmontable. "Mais il va falloir produire de la donnée, évaluer précisément où sont les fuites de carbone", souligne Pierre Laffont, le directeur des affaires européennes de France industrie. @Solène Davesne
Taxe carbone aux frontières: ce qui change au 1er octobre
Le 1er octobre 2023 marque une étape décisive pour le Mécanisme d'ajustement carbone aux frontières. Egalement appelé taxe carbone aux frontières, le dispositif obligera les entreprises qui importent dans l'Union européenne "des marchandises à forte intensité carbone" des secteurs du fer et de l'acier, de l'aluminium, du ciment, des engrais et de l'électricité, à payer une taxe sur le CO2 émis lors de leur fabrication à l'étranger. Mais la taxe carbone aux frontières est loin de faire l'unanimité. En cause, la disparition trop brutale des droits à polluer qui sont aujourd'hui distribués aux industriels gracieusement, le risque d'une distorsion de compétitivité pour les secteurs en aval, et l'absence de protections à l'export, au moment où le plan massif d'investissement américain (Inflation Reduction Act) les menace déjà. "Si on ne l'applique pas de façon intelligente, nous serons en danger. Elle se transformera en outil de désindustrialisation massive", avertit ainsi le président de France Industrie, Alexandre Saubot, dans les colonnes de L'Usine nouvelle. Les industriels craignent, en effet, qu'une telle mesure vienne alourdir très fortement leurs coûts. Rexecode évalue à 4 milliards d'euros environ les surcoûts pour l'industrie française en 2034. (avec AFP)
La taxe carbone européenne suscite autant d’espoir que de méfiance
Malgré les soupçons de protectionnisme qui pèsent sur le dispositif, l’entrée en vigueur le 1er octobre 2023 du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières stimule les réflexions autour de la mise en place d’un prix pour cette matière première. Sitôt la proposition de la Commission relative au MACF rendue publique, en juillet 2021, plusieurs des pays membres de l’Organisation se sont inquiétés d’un projet jugé attentatoire aux règles de libre-échange. Les industriels européens ne sont pas davantage sereins. Le syndicat de l’acier italien multiplie les prises de parole. "Le coût de l’acier provenant de territoires tiers pourrait augmenter jusqu'à 15%. Cela aurait des répercussions importantes sur l’ensemble de l’économie italienne et européenne", a récemment déclaré son président Paolo Sangoi. En France, France Stratégie comme Rexecode ont pointé les imperfections et insuffisances du mécanisme. @ Annick Masounave