Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Les dernières statistiques publiées par l'Insee sur les salaires du secteur privé en France, montrent que le salaire net moyen corrigé de l'inflation a baissé de 1% en 2022. "Ce recul est le plus fort observé sur les vingt-cinq dernières années, hormis les évolutions en trompe-l’œil en 2020 et 2021" selon l'Insee. Le salaire net moyen a par contre nettement augmenté en euros courants. Explications et éléments de perspectives par Olivier Redoulès pour Europe Soir. Il revient également sur la question des trappes à bas salaires.
Olivier Redoulès, directeur des études de Rexecode répond aux questions d'Hélène Zelany (Europe1)
Le recul du salaire net réel s’explique d’abord par un choc d’inflation majeur et importé avec notamment à la hausse des prix de l’énergie. En 2022, les hausses de salaires ont été très importantes, de 4,2% en euro courant en moyenne, mais avec la hausse de l’inflation, le salaire réel recule de -1%.
Le choc étant importé, les salaires ont suivi avec retard mais les négociations récentes permettent d’anticiper un rattrapage. Les ménages les plus modestes ont été en général épargnés, le Smic ayant suivi l’inflation, et les pertes se sont plutôt concentrées sur le haut de la distribution des salaires. Les salariés en poste ont plutôt vu leur revenu augmenter, mais il y a eu beaucoup d’embauches qui ont induit des changements de composition de la main d’œuvre. Ces effets de composition ont contribué à freiner l’évolution des salaires.
Il y a deux sujets. D’abord la restauration est le secteur qui a eu le plus de mal à augmenter ses prix. Ensuite, les différents dispositifs socio-fiscaux, avec des allégements de charges qui s’éteignent à environ 1,2 Smic, mais aussi la prime pour l’emploi et la progressivité de l’impôt sur le revenu, peuvent générer des "trappes à bas salaires". Ils exigent d'augmenter fortement le salaire "super brut" pour augmenter le salaire net d'impôts. Ce sujet était au cœur de la conférence sociale d’octobre 2023 (et des rencontres du CESE en mai dernier).
Globalement à Rexecode, nous estimons dans nos prévisions pour la France, qu’il y aura un peu plus de progression des salaires et moins d’emploi en 2024. Il y aura un rattrapage dans les mois à venir, en partie lié à des petits gains de productivité, et l’inflation sera davantage alimentée par les marges et les salaires que par les prix importés.
Nette baisse du pouvoir d’achat en France, une première depuis 1996: quelles en sont les causes ?
Europe 1, Europe Soir, interview d'Olivier Redoulès directeur des études chez Rexecode par Hélène Zelany