La baisse du taux de CICE en janvier 2018 a entraîné un rebond des coûts salariaux en France, interrompant la phase d'amélioration de la compétitivité-coût vis à vis de l'Allemagne amorcée en 2013. Même si l'impact de la baisse relative des coûts salariaux sur les parts de marché à l'exportation semble lent à se concrétiser, l'effort doit être maintenu et devrait être étendu rapidement à la fiscalité de production selon Denis Ferrand.

Sur le coût salarial, la tendance à l'amélioration est interrompue, pas inversée

Entre 2000 et 2012 la France avait progressivement perdu son avantage vis à vis de l'Allemagne en matière de coût salarial. Depuis la mise en place du CICE, puis du Pacte de responsabilité, cette tendance s'était inversée en faveur de la France, du moins dans l'industrie. Avec l'abaissement du taux de CICE au 1er janvier 2018, le coût salarial a de nouveau accéléré, interrompant la phase d'amélioration amorcée en 2013. En 2019, il sera converti en allègement.

• L'effet du coût salarial sur la compétitivité est indéniable mais asymétrique selon les phases de hausse et de baisse

Le CICE a-t-il été vraiment utile ? Oui, car agir sur les coûts est un préalable indispensable à la restauration de la compétitivité. Mais l'incidence des coûts sur l'évolution des parts de marché à l'exportation est asymétrique. La perte de parts de marché est rapide en cas de renchérissement des coûts, mais, lorsqu'ils baissent, la reconquête prend du temps. Le CICE et le Pacte de responsabilité ont d'abord permis, en plus d'un contexte favorable, une restauration des marges. La deuxième étape, la reprise de l'investissement, a eu lieu. La troisième étape, la restauration des parts de marché à l'exportation, se fait attendre. Dans ce contexte, l'interruption des gains de compétitivité sur les coûts salariaux peut inquiéter.

• La fiscalité sur la production reste un handicap qui nous distingue encore clairement de nos partenaires européens

La fiscalité de production comprend un ensemble d'impôts qui interviennent très en amont dans le compte d'exploitation de l'entreprise. En effet, ils ne sont pas assis sur les bénéfices mais sur le chiffre d'affaires (C3S), sur la valeur ajoutée (CVAE), sur les immobilisations (contribution foncière des entreprises) ou encore sur la masse salariale (versement transport). Ce sont donc des impôts dont l'entreprise doit s'acquitter quel que soit son résultat.

Ces prélèvements sur la production placent les entreprises françaises en un clair décalage vis à vis de leurs homologues allemandes. A taille comparable, dans l'industrie en France, la fiscalité de production c'est 25 milliards d'euros de prélèvements en plus par rapport à l'Allemagne (18 milliards si on prend en compte les crédits d'impôt qui n'existent pas en Allemagne).

Libre Propos sur Xerfi Canal, 18 juin 2018

Entretien mené par Yvan Best