Focus
Synthèse conjoncturelle hebdo
Le taux de chômage a légèrement augmenté au troisième trimestre 2024 en France et les plans sociaux récemment annoncés par Michelin ou Auchan ont fait grand bruit. Doit-on s'attendre à une vague de licenciements après la phase atypique de rétention des emplois ouverte avec la crise sanitaire? Le chômage va-t-il revenir en tête des préoccupations des Français? Denis Ferrand répondait aux questions d'Apolline de Malherbe ce 13 novembre sur RMC.
On peut parler d'un risque d'"effet ketchup" sur les plans sociaux
Le chômage a légèrement augmenté à 7,4% au troisième trimestre 2024 et les annonces de plans sociaux se multiplient. On peut parler d’un risque d'"effet ketchup" au sens ou ces plans augurent d’une correction de l’évolution de l’emploi par rapport à l’activité après la phase de rétention ouverte durant la crise du Covid-19. Depuis 3 ans, l’emploi progressait plus vite que l’activité, ce qui était anormal, d’autant que les indicateurs sur la santé financière des entreprises, telle que la trésorerie, ont eu tendance à se dégrader. Les premiers plans sociaux annoncés ouvrent probablement la voie à d’autres vagues de licenciements qui feront peut-être moins la "une" de l’actualité.
N’oublions pas les 2 millions d’emplois créés depuis 2017
La remontée récente du chômage ne doit pas occulter l’amélioration de fond de la situation de l’emploi, aussi bien en quantité qu’en qualité. N’oublions pas les 2 millions d’emplois créés depuis 2017. Depuis 2019, il y a eu certes un effet de l’apprentissage, mais aussi davantage d’embauches en CDI et moins en CDD. On est descendu à 7% de chômage, ce qui semble être un plancher car nous avons des difficultés à intégrer sur le marché de l’emploi les moins qualifiés. Au niveau Brevet, le taux d’emploi est très bas en France.
La vague des licenciements va probablement se répandre progressivement, à mesure des difficultés rencontrées par les divers secteurs d’activité. Une première séquence touche déjà les activités de transport, le commerce, et la construction qui a particulièrement souffert de la hausse des taux d’intérêt. On entre dans une séquence plus marquée par un contexte international défavorable pour l’activité en France: hausse des prix de l’énergie, concurrence très forte de la Chine sur les prix, offensive d’attractivité des Etats-Unis pour attirer les investissements sur son sol. On assiste à une course pour l’hégémonie industrielle entre les Etats-Unis et la Chine.
Au-delà des licenciements, il faut observer les flux d’embauches qui permettent de les absorber. Les embauches étaient jusqu’ici dynamiques mais l’enquête que nous menons avec la Bpi auprès de PME et TPE qui paraitra demain montre que les dirigeants deviennent beaucoup plus prudents sur leurs projets d’embauche. La conjoncture économique joue, mais aussi l’incertitude en matière économique et fiscale. Plus d’un tiers déclarent désormais reporter leurs intentions d’embauche.
Le manque de lisibilité de la politique économique et fiscale est un frein pour l'activité et l'emploi
Selon les dernières déclarations de Michel Barnier, le gouvernement renoncerait à réduire les allègements de cotisations au niveau du Smic. En revanche, la diminution des allègements au niveau de 2,5 et 3,5 Smic aurait bien lieu, au risque de renoncer à s’attaquer à l’enjeu structurel des freins à la progression des salaires proche du Smic, ou "smicardisation" de l’économie française.
Au sujet des plans sociaux, le Premier Ministre a également indiqué qu’il "demanderait des comptes" sur les aides publiques versées. Mais il ne faut pas perdre de vue que, même en tenant compte des aides publiques, les entreprises françaises sont davantage taxées que leurs concurrentes. Les aides publiques viennent compenser - partiellement - des prélèvements plus élevés. On voit que l'ensemble est complexe et peu lisible.
Denis Ferrand, "L'invité du jour" d'Apolline Matin,
RMC, 13/11/2024
Apolline Malherbe, avec la participation d'Emmanuel Lechypre
> podcast de l'interview
> extrait vidéo
Denis Ferrand était aussi "l'invité Actu" d'Europe1 Matin
Europe1, 13/11/2024
Dimitri Pavlenko
> Voir l'interview
Repères de politique économique
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